» Si cette fois les agents de la CENI (Ndrl Commission Électorale Nationale Indépendante) et ces policiers gardiens n’achètent pas des voitures donc ils mourront pauvres... » A lâché une dame au centre d’enrôlement MUSAWATO en ville de Goma.
Le monnayage de la carte d’électeur se légalise petit à petit selon plusieurs constants fait dans plusieurs centres d’enrôlement où on observe presque la même chose.
Pourtant interdit par la CENI, ce geste illégal commis par plusieurs agents enrôleurs a pris de l’ampleur.
À l’école MUSAWATO, étape par étape voici ce qui se passe si tu ne veux pas faire la queue : les agents enrôleurs ici ont leur point focal, un jeune aux biseps qui, n’étant pas reconnu par la CENI, se jointaux agents de sécurité commis sur le lieu. Derrière cette mission se cache une autre: c’est lui Lee chargé de récolte des 5000 francs congolais de ceux qui ne veulent pas passer beaucoup de temps au centre.
» Depuis le 17 Février, jour du lancement de l’enrôlement j’arrive ici, j’inscris mon nom sur la liste mais je n’ai jamais reçu de fiches, je n’ai jamais été appelé. Par contre je vois de gens venir, ils appellent le monsieur [pointant du doigt le jeune aux biseps] puis s’isolent. Quand il y a entre 5 et 10 personnes qui ont donné les 5000 FC, l’agent de la CENI sort de la salle avec un lot des fiches complétées. Quand il appelle les gens, nous voyons que c’est seulement les seuls suspects recevront les fiches, l’agent de la CENI rentre avec le reste » nous a indiqué Paméla, (prénom modifié), une dame d’environ cinquante ans.
Didier (prénom modifié) un jeune rencontré sur le lieu nous a expliqué les fiches qui retournent dans la chambre d’enrôlement. » Quand il vient appeler comme ça, c’est pour distraire. En réalité il ne cherche que les gens qui ont payé. Venir avec ces fiches c’est seulement tromper notre vigilance, il vient avec les fiches de gens qui ont reçu des cartes il y a longtemps, et quand il appelle, vous voyez que c’est tout le monde qui n’est pas là. »
Cette analyse de Didier a été constaté. Sur place l’agent de la CENI est sorti en notre présence avec des fiches et est allé appelé, curieusement sur une vingtaine d’appelés, seuls 4 personnes étaient là !
« J’ai donné de l’argent pour trouver ma carte, sinon je ne pouvais pas sortir d’ici. J’ai remis 5000fc à la personne qu’on m’a indiquée et j’ai envoyé mon identité sur SMS puis on m’a dit d’attendre ma fiche car quelqu’un allait la compléter de l’intérieur. Un instant après on m’a appelé, j’ai pris ma fiche et je suis entré. » A dit un homme en costume qui brandissait sa carte tout souriant.
Un homme qui voulait se révolter et interpeler un agent de la CENI sur la gravité de ce qu’ils font s’est vu répondre par cette dame qui arborait un badge CENI, avec un sourire mesquin, comme si celle-ci confirmait cette pratique : « Si tu veux aussi entrer, donne de l’argent comme les autres selon toi ».
Dans ce centre d’enrôlement comme dans plusieurs autres d’ailleurs, certains passent entre 30 minutes et une heure quand d’autres y passent des journées entières. Les dames enceintes, les personnes de troisième âge ne constituent pas une priorité : » Si seulement je tombait avec mon bébé, j’allais tout gâter ici … » A dit une dame, bébé à la main après une bousculade.
En tout cas la carte d’électeur est devenue un fonds de commerce pour certains agents de la CENI et policiers dans plusieurs centres d’enrôlement ; si rien n’est fait, la gloutonnerie de l’argent risque de l’emporter et, même une année après, tous les habitants n’auront pas encore de cartes.
Stoïcien Sky LWEMBO